Un an plus tard, quel avenir pour les tours de bureaux?
Environ un pied carré d’espace commercial sur dix est maintenant disponible à louer aux centres-villes de Toronto, Vancouver et Montréal. Les taux d’inoccupation sont en forte hausse depuis le début de la pandémie.
PHOTO : RADIO-CANADA / PHILIPPE DE MONTIGNY
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Philippe de Montigny (accéder à la page de l’auteur)
Philippe de MontignyPublié le 11 mars 2021
La pandémie a perturbé le marché des locations commerciales à l’échelle du pays et les centres-villes semblent moins sollicités par les entreprises. Cette situation soulève des questions sur l’avenir des tours de bureaux.
Au centre-ville de Toronto, plus de 9 millions de pieds carrés sont disponibles à louer ou à sous-louer, soit l’équivalent de 450 étages. Il s’agit d’une augmentation de 155 % de l’espace commercial inoccupé par rapport au début de la crise sanitaire.
À Toronto, 274 étages se sont libérés dans le centre-ville. Ça représente beaucoup de gratte-ciels qui sont devenus disponibles en un an.Une citation de :Laurent Benarrous, courtier immobilier commercial chez Avison Young
Les espaces commerciaux à louer se sont multipliés dans les grands centres-villes au pays, après une année de pandémie.
PHOTO : RADIO-CANADA / SPENCER GALLICHAN-LOWE
Cette hausse est encore plus frappante à Vancouver, où le taux d’inoccupation était le plus faible au pays avant la pandémie. La quantité d’espaces commerciaux au centre-ville qui se sont libérés au cours de la dernière année a grimpé de 167 %.
Dans ces deux marchés-là, la situation prépandémique était très favorable. On avait très peu de pieds carrés disponibles à louer, souligne le courtier Laurent Benarrous. La pandémie naturellement a frappé avec un effet assez négatif pour le marché immobilier.
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L’analyse effectuée par Avison Young se fie sur une estimation selon laquelle un étage moyen dans les centres-villes canadiens est de 20 000 pieds carrés.
PHOTO : RADIO-CANADA / CAMILE GAUTHIER
Calgary connaissait déjà un exode des locataires de tours de bureaux avant la pandémie. Le marché immobilier, tant résidentiel que commercial, a beaucoup souffert de la chute du prix du pétrole ces dernières années.
Maintenant, avec le télétravail généralisé, les perspectives sont encore plus sombres
, souligne le chercheur Rylan Graham, qui propose dans un récent rapport de transformer des bureaux vides de la métropole albertaine en logements abordables.
Plus du quart (25,2 %) de l’espace commercial au centre-ville de Calgary était déjà vacant en avril 2020, selon les données d’Avison Young. Ce taux d’inoccupation se situe maintenant à 27 %, une légère augmentation.
Quand on regarde le portrait de ce qui se passait avant la pandémie par rapport à aujourd’hui, les choses ne se sont pas tant aggravées à Calgary parce que ça allait déjà tellement mal au départ
, affirme Laurent Benarrous de la firme immobilière Avison Young.
Le taux d’inoccupation des tours de bureaux au centre-ville de Calgary frôlait déjà les 25 % avant la pandémie, une conséquence de la crise du pétrole.
PHOTO : RADIO-CANADA / AXEL TARDIEU
À Montréal, le taux d’inoccupation dans le marché des bureaux figure au second rang parmi les plus élevés au pays, mais tout de même loin derrière Calgary. Le centre-ville constatait déjà un exode de locataires commerciaux au profit des banlieues, un phénomène exacerbé par la COVID-19, explique le courtier.
M. Benarrous recense une hausse d’environ 46 % du nombre de pieds carrés à louer dans le centre-ville montréalais au cours de la dernière année.
Le télétravail, là pour de bon?
Statistique Canada rapportait en juin dernier que près de 40 % des Canadiens occupent des emplois qui peuvent être effectués à la maison. De nombreux sondages publiés au cours des derniers mois démontrent que bon nombre de travailleurs souhaiteraient pouvoir continuer de travailler à domicile.
C’est le cas d’Annie Pinet, qui travaille chez PwC Canada mais en télétravail depuis environ un an. La résidente d’Oshawa avait l’habitude de passer deux heures en train de banlieue chaque jour pour se rendre au bureau au centre-ville de Toronto et revenir à la maison.
Bien que son bureau chez PwC Canada se trouve au centre-ville, Annie Pinet travaille majoritairement à domicile, à Oshawa.
PHOTO : ANNIE PINET
Elle devait parfois se rendre également aux bureaux satellites de l’entreprise à Vaughan et à Oakville pour rencontrer des clients.
Pour moi, personnellement, avoir l’option et la flexibilité de continuer de travailler à la maison, mais aussi de me rendre au bureau, ça va être très important.Une citation de :Annie Pinet, consultante d’affaires chez PwC Canada
Elle estime qu’il y aura toujours une demande dans le marché des bureaux une fois que la pandémie s’essoufflera. Ça va changer pour le mieux, mais ça ne disparaîtra pas
, croit-elle.
Des employeurs tels que Shopify, Twitter et OpenText ont décidé de garder leurs employés en télétravail de façon permanente. D’autres adoptent un modèle de travail hybride.
Résultat : certains cherchent à sous-louer ou carrément à vendre quelques-uns de leurs locaux.
Le conglomérat Power Corporation of Canada cherchait récemment des locataires pour ses bureaux aux étages supérieurs du Brookfield Place, dans le quartier financier de Toronto. Questionnée à ce sujet par Radio-Canada, l’entreprise n’a pas voulu confirmer si elle avait trouvé preneur.
La compagnie de services de commerce en ligne Shopify louera 340 000 pieds carrés dans le nouveau complexe The Well, qui est présentement en construction, au centre-ville de Toronto.
PHOTO : RADIO-CANADA / SPENCER GALLICHAN-LOWE
Les géants du commerce en ligne Amazon et Shopify, pendant ce temps, se sont accaparé de nouveaux locaux dans la Ville Reine.
L’entreprise d’Ottawa louera quelque 340 000 pieds carrés dans le nouvel immeuble The Well, en plein cœur du centre-ville, alors que son rival américain a signé de nouveaux baux afin d’occuper 100 000 pieds carrés de plus d’ici l’an prochain.
À lire aussi :
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Chute des investissements
Au Canada, les investissements en immobilier commercial en 2020 totalisaient environ 37 milliards de dollars, une baisse de 17 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années, selon un nouveau rapport de la firme immobilière JLL.
Il y a eu un arrêt presque total des transactions immobilières en mars, avril et mai. Ça a tranquillement repris plus tard dans l’année.Une citation de :Mark Sinnett, vice-président exécutif, marché des capitaux chez JLL
Mark Sinnett, qui dirige l’équipe des marchés des capitaux chez JLL à Montréal, affirme que l’Alberta et Toronto ont été les plus touchés dans la dernière année.
Il confirme un nouvel appétit de sa clientèle pour les édifices dans les banlieues. Il y avait une tendance depuis plusieurs années où on parlait toujours de la densification du centre-ville, des grosses tours, des grosses copropriétés
, dit-il.
Maintenant, on voit un peu un retour de l’intérêt pour les banlieues
, lance M. Sinnett.
Des régimes de retraite ont vendu certains de leurs actifs en immobilier commercial ces derniers mois.
PHOTO : RADIO-CANADA / KEVIN MCINTYRE-TOR
Bien des investisseurs institutionnels, dont les régimes de retraite, ont cherché à vendre leurs actifs dans les centres-villes, alors que les investisseurs privés en ont profité pour acheter, selon le rapport de JLL. Ceci représente en fait plus de la moitié du volume des transactions.
Ils sont prêts à continuer à faire des investissements aujourd’hui, même s’ils savent que pour un trimestre ou deux trimestres, les rendements ne vont pas être aussi bons à cause de la pandémie
, affirme l’analyste.
Ce n’est pas quelque chose qui va durer à long terme
, croit-il.
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